Suivi de l’entraînement de l’intérieur, immersion nocturne, entretiens avec les hommes de l’unité : le peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie était mis en lumière, en juin dernier.
La genèse d'un reportage est parfois surprenante. L'idée d'un papier en immersion sur le Peloton de surveillance et d'intervention de gendarmerie (PSIG) est née dans un lycée agricole… En l'occurrence, celui de Bonnefont. En octobre 2013. Lors des premières Rencontres de sécurité organisées par le ministère de l'Intérieur. Plusieurs gendarmes sont présents pour expliquer leurs missions aux élèves. Parmi eux, deux militaires retiennent particulièrement l'attention des lycéens. Il s'agit de deux hommes du PSIG. Question d'attitude, sans doute. De tenue, aussi. Et puis il y a ce qu'ils présentent : un arsenal impressionnant, appartenant à leur unité, entre fusil-mitrailleur, taser et flash-ball…
Plus armés, plus entraînés, spécialisés dans l'interpellation
Mais aussi des objets singuliers confisqués lors d'interpellations : comme ce fusil à canon scié ou cette chaîne de tronçonneuse détournée en arme… L'idée de ce reportage vient de là. Du regard appuyé des lycéens. De la relative méconnaissance du grand public pour ces gendarmes d'un autre type. Plus armés. Plus entraînés. Et spécialisés dans l'interpellation.
Les mois passent. Après avoir obtenu les diverses autorisations, notamment avec l'obligation d'attendre la fin des diverses périodes électorales, un premier rendez-vous est enfin fixé avec le responsable et fondateur du PSIG de Brioude, Eric Vauléon.
La quarantaine, énergique et affable, l'adjudant et responsable de l'unité est le genre d'homme à vous mettre tout de suite à l'aise. Il énumère les différentes missions du PSIG, la composition de son équipe, explique son parcours, répond en s'amusant aux questions parfois idiotes d'un profane et n'hésite pas à raconter certaines affaires très marquantes. Comme cette singulière interpellation dans un appartement littéralement recouvert de matières fécales…
Puis la rencontre se fait avec le reste de l'équipe. Loin des clichés des militaires froids et robotisés dans leurs réponses, les gendarmes sont ouverts, souriants et loquaces.
L'immersion, au c'ur du PSIG, doit se faire en deux temps. D'abord en suivant l'un des leurs nombreux entraînements. Ensuite en les accompagnant lors une patrouille nocturne. Deux rendez-vous distincts sont ainsi fixés.
Le premier a lieu, un après-midi, dans un bâtiment désaffecté de la périphérie de Brioude. Six gendarmes du PSIG sont présents. En tenue complète : casqués, armés et vêtus d'un gilet pare-balles. Ils vont prendre d'assaut l'immeuble et procéder à une interpellation fictive. Selon une méthodologie rigoureuse. Ils me proposent de vivre l'entraînement de deux façons : en étant à leurs côtés dans la colonne d'assaut ; puis, après, en restant auprès de leur cible, campée par un autre militaire. Avancer en colonne permet de prendre conscience de l'efficacité de leurs méthodes d'intervention et de deviner la montée d'adrénaline en situation réelle. À l'inverse, en se confrontant directement à leur interpellation, on mesure toute la violence ressentie et la dimension volontairement musclée et dissuasive. Un choc renforcé par les cris des gendarmes.
Un homme en cavale
Le second rendez-vous est programmé un jeudi soir. À 22 heures. Avec Régis, 37 ans, adjudant et numéro 2 du PSIG, et Florian, un gendarme adjoint volontaire de 24 ans. Pour cette sortie un peu spéciale, un photographe de Clermont-Ferrand me rejoint. Un confort de travail. Mais aussi une nécessité : possiblement, la nuit peut basculer à tout instant dans l'action. Il faut pouvoir agir et réagir vite. La soirée débute d'ailleurs par une information choc : une femme aurait reconnu en ville un violeur en série actuellement en fuite. L'homme est recherché dans tout le pays et sa photo circule dans tous les médias nationaux. Le temps des vérifications, qui prendront une bonne heure, et la tension monte, monte. Surtout chez mon confrère et moi. L'interpellation, suivie en directe par des journalistes, de l'un des hommes alors parmi les plus recherchés du pays serait un énorme coup… Mais, après vérifications, l'hypothèse retenue est celle d'un homme ressemblant au fugitif… Adieu scoop, promotion, carrière dorée !
Nous replongeons dans la nuit brivadoise. Qui se révèle par la suite très calme. Mais nous échangeons longuement avec les gendarmes du PSIG. À propos de leur rôle. De leur investissement. De leur regard sur la violence. Les heures défilent. Nous assistons à plusieurs contrôles. Et, presque malgré nous, nous épousons leur état d'esprit : qui se cache dans cette voiture immatriculée en Bretagne, qui circule bien lentement sur cette route déserte ? Pourquoi celle-ci roule à si vive allure en plein centre-ville ? Derrière chaque contrôle, il y a un point d'interrogation. Une inconnue. Et un possible risque.
En état d'alerte
Comme eux, nous basculons d'une discussion légère au contrôle soudain d'un individu effectué avec beaucoup de précaution. Leurs méthodes sont impressionnantes. Même de l'intérieur. Mais comme ils le répéteront au cours de cette nuit-là : « Nous agissons en sécurité. »
La patrouille se termine aux environs de 3 heures du matin sur le parking d'un supermarché. Si cette nuit aura peut-être été en deçà de nos attentes en termes d'action, elle aura néanmoins permis de côtoyer et d'apprendre à connaître ces deux gendarmes du PSIG. Au-delà de leur simple fonction. Mais aussi d'appréhender l'une des composantes essentielles de leur profession : attendre en étant aux aguets.
Nicolas Ruiz
http://www.lamontagne.fr/auvergne/actualite/departement/haute-loire/brioude/2014/12/27/dans-lombre-des-gendarmes-du-psig_11273995.html